Invention, Anne Garréta, actions du personnage, réaction, suite d'un récit
"Il était deux heures et demie du matin, il me fallait pendant au moins trois heures remplir le silence par du bruit. En jetant un rapide coup d'oeil à la pile de disques empilés, je me suis rendu compte que l'opération allait être encore plus périlleuse que je ne le pensais. J'ai inspiré bien fort et, au même moment, j'ai senti mon front se couvrir de sueur, tandis que le casque se faisait de plus en plus lourd sur mes oreilles. Je devais cacher mon appréhension."
[...] Tétanisée, je me suis contentée de faire semblant de manipuler la table de mixage. Mes actes n'en étaient pas, je mimais ce que font les DJs, mais je ne faisais absolument rien. À un moment précis, j'ai regardé le disque qui ne tournait pas, celui que j'allais devoir passer juste après, et je l'ai détesté plus que je n'ai jamais détesté rien ni personne dans ma vie. Je n'avais aucune idée de ce que j'allais faire de lui. J'avais juste envie de fuir aux toilettes moi aussi, comme Michel. [...]
[...] J'ai tenté d'activer la deuxième piste en appuyant sur un bouton qui s'est allumé en rouge au même moment. C'était sûrement bon signe. Le son a commencé à baisser dangereusement, et j'ai augmenté le curseur de la deuxième piste progressivement, pour tenter un fondu sonore. Sauf qu'il ne s'est absolument rien passé. Le son s'est totalement évanoui, et des centaines de visages étonnés se sont tournés vers moi, comme pour me dire « eh bien alors la musique ? » Profondément honteuse, j'ai arraché le casque de mes oreilles et je suis partie en courant rejoindre Michel qui se perçait les veines au rythme de mes sanglots. [...]
[...] Je ne sais pas pourquoi, mais dans un élan de confiance, je me suis mise à faire coulisser un des curseurs jusqu'en haut, et suite à cette action, un énorme larsen a résonné dans la pièce. J'ai vu les danseurs et les danseuses placer leurs mains sur leurs oreilles, les visages crispés. J'ai immédiatement remis le curseur à sa place, les mains tremblantes. Ils ont repris leurs pas de danse mais avec moins d'entrain, le temps de se remettre de la catastrophe auditive que je venais de causer. [...]
[...] Il était deux heures et demie du matin, il me fallait pendant au moins trois heures remplir le silence par du bruit. En jetant un rapide coup d'?il à la pile de disques empilés, je me suis rendu compte que l'opération allait être encore plus périlleuse que je ne le pensais. J'ai inspiré bien fort et, au même moment, j'ai senti mon front se couvrir de sueur, tandis que le casque se faisait de plus en plus lourd sur mes oreilles. [...]
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