Baudelaire, Les Fleurs du mal - publié le 03/02/2010

Résumé du document

En 1857, Les Fleurs du mal furent condamnées par la justice pour immoralité. Mais l'éclairage qu'apporte un tel titre va plus loin que ce qu'a pu en saisir la justice. En effet, dans un projet de préface, Baudelaire revendique son intention « d'extraire la beauté du mal », recherche paradoxale et presque diabolique. Le titre établit donc un pacte de lecture fiable entre l'auteur et le lecteur.

La thématique du mal annoncée par le titre du recueil est doublement justifiée par les poèmes, car ils traitent de la souffrance et de la débauche: du fait d'« avoir mal » et de celui de « mal faire ».
La souffrance est omniprésente en ce qui concerne l'état d'âme du poète. L'un des volets les plus célèbres des Fleurs du mal s'intitule en effet « Spleen et Idéal » et illustre l'écartèlement du poète entre ces deux attractions contradictoires. Le mot spleen lui-même, emprunté à l'anglais par Baudelaire, traduit l'idée de « mélancolie» ou «humeur noire» et renvoie à un état d'âme négatif proche de la dépression. Dans l'univers baudelairien, cet état d'âme surgit au contact de la trivialité du réel, comme le montre le quatrième des poèmes intitulés « Spleen », dans la section « Spleen et Idéal ».

Extraits

[...] En effet, la fleur renvoie à l'idée d'une anthologie, d'un recueil des meilleurs poèmes. Le pluriel souligne la diversité possible sous le terme générique de fleur Le mal au singulier renvoie à l'unité thématique et structurelle. De plus, nous pouvons voir à l'œuvre dans cette alliance de mots le processus de création poétique, qui transfigure le réel et permet de s'en échapper: «les fleurs vénéneuses poussées sur un fumier» sont la clef de l'esthétique baudelairienne. Ainsi la laideur est un sujet d'inspiration récurrent, présent sous forme fantastique (vampire, spectre, fantôme) et sous forme réaliste (charogne, petites vieilles, miséreux . [...]

[...] L'Espoir/Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,/Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir». L'Espoir» exprime l'aspiration à l'idéal, alors que «L'Angoisse» ou ennui au sens fort du terme, expriment la sensation d'étouffement qui naît dans l'esprit du poète quand il ne peut quitter ici-bas pour s'élancer vers l'idéal. Le les larmes pleure la mort physique crâne sont associés à cette souffrance du spleen. Les larmes ou la tristesse sont souvent métaphorisées par la pluie: ainsi, dans le même poème, on trouve cette métaphore: [ . [...]

[...] Du haschisch et du vin, évoqués dans Les Paradis artificiels, Les Fleurs du mal retiennent surtout Le Vin titre d'une section du recueil. Ainsi, Le Vin des amants fait l'éloge de l'ivresse: «Partons il cheval sur le vin/Pour un ciel féerique et divin/[ . sœur, côte il côte nageant,/Nous fuirons sans repos ni trêves/Vers le paradis de mes rêves ! On voit bien, à travers cet exemple, à quel point Baudelaire il attache à ses titres une sémantique explicite du contenu et claire pour le lecteur. [...]

[...] ] Au poète sinistre, ennemi des familles,/Favori de l'enfer, [ . ]/Tombeaux et lupanars montrent sous leurs charmilles/ Un lit que le remords n'a jamais fréquenté» Les Deux Bonnes Sœurs Le mal est donc omniprésent dans le recueil des Fleurs du mal et le titre se justifie pleinement par la présence de la souffrance et de la débauche. [Le rôle du sacré et du sublime annoncé par le titre] Mais la présence du mal est à rattacher de manière plus profonde à la spiritualité, et au défi lancé à Dieu. [...]

[...] ] la pluie étalant ses immenses trainées/D'une vaste prison imite les barreaux». Le premier poème de la section Spleen et idéal» commence par la personnification du cinquième mois du calendrier républicain: Pluviôse, irrité contre la ville entière./De son urne à grands flots verse un froid ténébreux L'hostilité du monde réel est stigmatisée également par le bruit: La rue assourdissante autour de moi hurlait» À une passante»). La poète a donc mal et exprime sa souffrance, comme l'annoncent le titre du recueil et les titres des sections ou des poèmes eux-mêmes. [...]