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Présidence du Conseil de sécurité à l'ONU : décryptage

En pleine guerre en Ukraine, depuis le samedi 1/4/23, la Russie vient de commencer la présidence du Conseil de Sécurité (CS) à l'ONU pour 1 mois. Comment Moscou va le superviser en s'efforçant de maintenir paix et sécurité dans le monde tout en gérant son offensive militaire en Ukraine ? La Russie occupe donc la présidence du CS à l'ONU, chargé de garder la paix et la sécurité alors qu'elle est vue comme la plus grande menace pour celles-ci.

Présidence du Conseil de sécurité à l'ONU : décryptage

Credit Photo : ONU

La dernière fois que la Russie a occupé la tête du CS en février 2022, l’invasion avait débuté en Ukraine. Ainsi, elle a été condamnée par environ 3/4 des membres de l'ONU, d’autant plus que son Président de la république fédérale depuis 2000 Vladimir POUTINE fait l'objet d'un mandat d'arrêt pour crimes de guerre et est poursuivi par la Cour pénale internationale depuis mi-mars.
Tout d’abord, nous étudierons la fonction du CS et ce que signifie en avoir la présidence.
Ensuite, nous analyserons les présidences de belligérants.
Enfin, nous démontrerons si le système est réformable ou non.

Fonction du CS et ce que signifie en avoir la présidence

Tout d’abord, le CS est l'organe exécutif de l'Organisation des Nations Unies (ONU). Il a été créé le 17/1/1946 et se définit comme : « la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales » selon l’article 24 de la Charte des Nations Unies. Pour cela, il dispose de pouvoirs spécifiques comme l'établissement de sanctions internationales et l'intervention militaire. Certaines décisions, résolutions, ont force exécutoire et « les membres de l'Organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de sécurité ». Il se réunit à New York, au siège des Nations Unies, aux Etats-Unis. Ses membres sont présents tout le temps car le CS peut avoir besoin de se réunir, comme en cas de crise exceptionnelle. Le CS comprend 15 membres : 5 permanents avec droit de veto (États-Unis, France, Russie, Royaume-Uni, Chine) et 10 élus pour 2 ans (Albanie, Brésil, Emirats arabes unies, Equateur, Gabon, Ghana, Japon, Malte, Mozambique, Suisse) (renouvelés par moitié tous les ans).
Selon le règlement intérieur du CS, la présidence est mensuelle. Elle est assurée par chacun des membres de manière tournante, dans l'ordre alphabétique anglais des noms des pays. Le président du CS incarne celui-ci comme organe de l’ONU. Sa présidence a déjà évidemment été exercée par des pays controversés. Actuellement, ce président est Vassili NEBENZIA, diplomate russe à l’ONU. Depuis 2017, il est le représentant permanent de la Russie. Le président du CS préside les réunions et s'occupe d'une grande partie du travail administratif. Mais, il n'a que très peu de pouvoir pour influencer les décisions prises par le Conseil de sécurité. La présidence du CS facilite les débats et l’organisation des travaux. Selon l’ONU, « Si elle ne confère pas de prérogatives particulières, elle permet toutefois de donner des impulsions politiques ».

Ensuite, la guerre russo-ukrainienne est un conflit militaire et diplomatique. Elle a débuté en février 2014 suite à la révolution ukrainienne et s'est d’abord canalisée sur le statut de la Crimée et de certaines parties du Donbass, internationalement reconnues comme faisant partie de l'Ukraine. Les 8 années du conflit ont vu l'annexion de la Crimée par la Russie et la guerre du Donbass (entre l'Ukraine et les séparatistes ukrainiens, militairement soutenus par la Russie), ainsi que des incidents navals, tensions politiques et la cyberguerre. À la suite d'un renforcement militaire russe à la frontière entre la Russie et l'Ukraine à partir de la fin 2021, le conflit s'est considérablement étendu lorsque la Russie a lancé une invasion à grande échelle de l'Ukraine le 24/2/22. Depuis, la Russie est accusée d'attaques constitutives de crimes de guerre. Elle est suspendue du Conseil de l'Europe le 25/2/22, puis son exclusion est votée à l'unanimité le 16/3/22 parce qu’elle ne respecte plus les valeurs de l'organisation, ni aucun des engagements qu’elle a pris lors de son adhésion. Les russes n'ont désormais plus accès à la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH).
L'invasion provoque une réaction internationale des pays d'Occident qui isolent la Russie par des sanctions économiques et à une assistance à l'Ukraine par les membres de l'OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord) — principalement les États-Unis, le Canada et Royaume-Uni — et les pays de l'Union Européenne, sous forme d'une assistance économique et militaire comprenant des livraisons d'armements, munitions et des aides à la formation technique/militaire des combattants ukrainiens mobilisés. Dans les affaires internationales, si un membre permanent du CS est mêlé dans l'une ou l'autre partie d'un conflit armé, le CS ne peut rien faire parce qu'il exercera son droit de veto, comme la Russie l'a fait pour l'Ukraine, la Chine l'a fait pour Taïwan, les Américains l'ont fait pour l'Afghanistan.
Moscou a déjà dévoilé ses priorités. NEBENZIA a annoncé une réunion informelle "sur les enfants évacués de la zone de guerre du Donbass et de l'Ukraine" afin de "dissiper les faux récits diffusés par les médias occidentaux". Sergueï LAVROV, diplomate et homme politique Russe, Ministre des Affaires Etrangères depuis 2004, présidera également un débat public sur "un multilatéralisme efficace à travers la défense des principes de la Charte des Nations Unies". Le 25 avril, il fera des débats sur la situation géopolitique au Moyen-Orient.

Les présidences de belligérants

D’autres présidences de belligérants ont existées, comme par exemple lors de la guerre en Irak, en 2003. Cette guerre faisait suite à la mission de l'ONU en Irak qui avait en charge le désarmement de l'Irak (résolution 1441, en 2002, votée à la demande des Américains et Britanniques) le 8/11/2002. Le CS de l'ONU n'avait pas pu se mettre d'accord entre les partisans.

Le système est-il réformable

Enfin, les États soutenant l'Ukraine dénoncent une forme de dégradation du niveau de représentation des pays concernés. Parmi eux, les États-Unis disent que la Russie ne devrait pas être membre permanent du CS. La question se pose-t-elle dans cet organe multilatéral ? C'est une déclaration qui est politique plutôt qu'effective sur un plan institutionnel. Ainsi, concernant les propositions de réforme du CS, s’il est juridiquement possible d’exclure la Russie (la Charte prévoit bien qu’un membre puisse être évincé en cas d’abus des droits humains), cela se fait sur recommandation du CS où la Russie dispose du droit de veto. De même, un éventuel amendement de la Charte qui retirerait le statut de membre permanent à la Russie doit lui aussi être validé par le CS, et donc de la Russie.
Le Président ukrainien, V. ZELENSKY a dénoncé la « faillite » des Nations Unies et appelé à une « réforme des institutions mondiales, y compris du Conseil de sécurité de l’ONU ». « La présidence russe du Conseil de sécurité des Nations unies est une gifle au visage de la communauté internationale », avait déploré son Ministre des Affaires Etrangères, D. KULEBA. Selon lui, « les membres actuels » de l’organe exécutif de l’ONU doivent « contrecarrer toute tentative » de la Russie d’« abuser de sa présidence ».
Puis, concernant la réforme de la composition du CS, c’est un sujet plus ancien. En effet, en 1996, un groupe de travail a suggéré d’inclure 5 nouveaux membres permanents dont le Japon, l’Allemagne et 3 pays du tiers monde, et soumis de créer 4 autres sièges de membres non permanents dans le but d’accroître la représentativité du CS. J. CHIRAC s’y était déclaré favorable dans un article le 22/9/1996. En 1997, les États-Unis recommandèrent 5 nouveaux sièges permanents avec un système de rotation et le souci que le CS ne dépasse pas 20 membres pour rester efficace.
La France est favorable à une réforme du CS qui se traduirait principalement par son élargissement. « Je souhaite faire avancer la réforme du Conseil de sécurité pour permettre à de nouveaux membres permanents comme non permanents d’y siéger », a déclaré F. HOLLANDE le 27/8/2012, à la 20ème Conférence des Ambassadeurs. Cette structure centrale de l'ONU doit « s'adapter aux réalités du XXIe siècle », en prenant en compte l'émergence de nouvelles grandes puissances sur la scène internationale et la fin de l'affrontement idéologique entre les 2 blocs de la guerre froide. La France soutient le Brésil, l'Allemagne, le Japon et l’Inde à un poste de membre permanent du CS. Elle souhaite aussi une meilleure représentativité de l'Afrique, « notamment parmi les membres permanents ». Elle propose de discuter de l'hypothèse de la présence d'un pays arabe au CS comme membre permanent. En septembre 2022, E. MACRON et le Président américain J. BIDEN ont plaidé pour l'élargissement de l'institution.
Pour sa part, l’ancien secrétaire général des Nations Unies, le 7ème de 1997 à 2006, Kofi ANNAN, diplomate ghanéen et prix Nobel de la paix en 2001, a soutenu un plan comprenant l'ajout de 6 nouveaux membres permanents. Outre les 4 pays proposés par la France, il s'agissait d'attribuer 2 sièges à l'Afrique. Les États prétendus pouvaient être l'Afrique du Sud et l'Égypte qui représentait alors les pays musulmans et le monde arabe. Il y avait 21 membres dont 11 permanents recouvrant tous les continents et religions.
Les pays siégeant en permanence ou non au CS sont influents et avec un poids politique important. Sur le plan diplomatique, un éventuel élargissement entraîne des rivalités régionales. Dans le cas français, voir l'Inde devenir un membre permanent entre en conflit avec des réticences pakistanaises. Idem en Europe, avec la candidature allemande qui pourrait déplaire à l'Italie ou l'Espagne. En Asie, le Japon aurait à composer avec les réserves de la Chine et Corée du Sud. Et, le Brésil ferait face au mécontentement argentin et mexicain. Concernant le plan d’ANNAN, c'est l'Algérie ou le Nigeria qui pourrait entrer en conflit pour discuter les places de l’Egypte et de l’Afrique du sud.
De plus, en 2000, concernant la réforme du droit de veto, l’ancien Ministre français de la Défense P. QUILES souhaitait limiter le veto aux questions de recours à la force et obliger à motiver son installation pour remédier à l’immobilisme. En 2012, au moment des exactions en Syrie, le secrétaire général d'Amnesty International de 2010 à 2018, S. SHETTY a déclaré qu'« il doit y avoir un moyen qui, lorsqu'il s'agit d'abus de droits de l'Homme à l'échelle dont nous parlons, rend l'utilisation du droit de veto tout simplement inacceptable ».
Et, concernant la réforme du régime des sanctions économiques, elles sont limitées dans le temps depuis 2000. Nous sommes passés d’une logique punitive à incitative.

De nombreux obstacles importants demeurent pour une réforme du CS. La procédure pour revoir la Charte est très contraignante. Aux termes de son article 108, la Charte peut être révisée par une décision de l'Assemblée générale, adoptée à la majorité des 2/3 des membres et ratifiée par les 2/3 des membres de l'Organisation, y compris tous les membres permanents du CS.
En attendant, la Suisse prendra à son tour la présidence tournante du CS des Nations Unies en mai 2023.

Références/sources :
https://www.un.org/securitycouncil/fr
https://www.consilium.europa.eu/fr/topics/security-defence
Wikipedia.

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