Parler de « politiciens » plutôt que « d'hommes politiques » implique le plus souvent une position critique à l'égard de la manière dont se fait la politique aujourd'hui dans les démocraties occidentales. Celle-ci peut être associée à une nostalgie par rapport à la figure de l'amateur éclairé, prenant sur son temps et sur ses biens propres par dévouement pour la chose publique. L'idée de professionnalisation est ambivalente : elle renvoie à l'hypothèse d'une compétence en même temps qu'à la crainte d'une dépossession du peuple souverain et de décisions politiques prises sur la base d'intérêts particuliers. Néanmoins, si la professionnalisation a pu contribuer à une monopolisation par les professionnels des affaires publiques, elle a aussi participé de l'autonomisation de la sphère politique par rapport aux intérêts des groupes sociaux dominants ; elle a reflété la démocratisation des régimes représentatifs occidentaux.
[...] Selon Roberto Michels, à mesure que le parti moderne évolue vers une forme d'organisation plus solide, on voit s'accuser davantage la tendance à remplacer les chefs occasionnels par des chefs professionnels La complexification des activités politiques, qui ont notamment requis une expertise croissante dans les domaines économique et juridique, a été un autre facteur favorisant la professionnalisation de la politique. Elle a permis une technocratisation du personnel politique sous la Ve République. Elle a provoqué l'apparition de nombreux acteurs qui, sans être des hommes politiques, peuvent être considérés comme des professionnels de la politique : personnels des instituts de sondage et des sociétés de communication, spécialistes de l'audiovisuel préparant les campagnes électorales, mais aussi analystes de la vie politique. II Une monopolisation du travail politique ? La professionnalisation, un dessaisissement ? [...]
[...] Le lien entre ces élites politiques et les élites sociales, ainsi que les conséquences de ce phénomène sur l'organisation démocratique, doivent donc être examinés. Bibliographie _ Aristote, Les Politiques, Paris, Garnier-Flammarion _ Max Weber, Le Savant et le Politique (1919-1921), Paris, Plon _ François d'Arcy, La Représentation, Paris Economica _ Raymond Aron, Classe sociale, classe politique, classe dirigeante Revue française de science politique, juillet septembre 1954. _ Daniel Gaxie, Les Professionnels de la politique, Paris, PUF _ Robert Dahl, Qui gouverne Paris, Armand Colin, 1973. [...]
[...] Ce type d'homme politique correspond, en France, au notable des IIIe et IVe Républiques. D'autres, enfin, vivent à la fois de et pour la politique. La professionnalisation implique alors à la fois un investissement complet dans l'activité politique et une dépendance économique à l'égard de cette activité. S'il considérait que cette professionnalisation était le résultat inévitable de la Weber la regrettait. Il craignait en effet que cette tendance débouche sur une monopolisation des activités politiques par des professionnels sans vocation. [...]
[...] Conséquence de la démocratisation, la professionnalisation de la politique en second lieu, historiquement contribué à une ouverture sociologique du milieu politique. Le pourcentage de députés ayant exercé les professions d'ouvriers, d'employés, de petits fonctionnaires ou d'instituteurs, a été multiplié par treize sous les IIIe et IVe Républiques. C'est là une conséquence directe de l'apparition de partis de masse octroyant des ressources à des personnes issues des classes moyennes et défavorisées, et leur permettant ainsi de s'investir dans la vie politique. La professionnalisation ne signifie donc pas forcément un accaparement des fonctions politiques par une élite sociale. [...]
[...] Le principe d'une rétribution sur les fonds publics des hommes politiques avait été proposé dès septembre 1789 et inscrit dans la Constitution de l'an III. L'indemnité parlementaire avait par la suite été supprimée sous les régimes censitaires et impériaux, pour être rétablie en 1848 puis en 1871. Si c'était la condition d'une ouverture sociale de la scène politique, voire l'indépendance des représentants vis-à-vis de clientèles électorales, qui se jouaient dans ce débat, le principe a durci les critiques et contribué à la stigmatisation des professionnels de la politique en nourrissant le soupçon d'un intéressement des représentants. [...]
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