Dès l'Antiquité, Platon posait la question de l'utilité de l'art dans La République. Pourtant, c'est au 19e siècle avec le développement de l'art pour l'art que la notion d'"inutilité" de l'oeuvre devient centrale. Dès lors se pose une question fondamentale : comment concilier cette inutilité affirmée avec la capacité révélatrice de l'art ?
[...] Ainsi, il apparaît que l'inutilité loin de nuire à l'?uvre d'art, constitue au contraire le fondement de sa valeur révélatrice selon Bergson. En effet, libérée de toute finalité pratique, l'attention de l'artiste peut se porter sur les aspects les plus fugaces et singuliers du réel, inaccessibles à notre regard utilitaire. L'?uvre, en fixant des éléments éphémères, parvient à immortaliser ce que notre perception quotidienne manque souvent. Elle dévoile ainsi des dimensions esthétiques du monde qui nous échappent mais sont porteuses de vérité. [...]
[...] Enfin, loin de nier sa valeur, l'inutilité de l'art constitue au contraire le fondement de sa capacité à dévoiler des vérités sur le réel (III). I. L'opposition entre art et utilité Bergson définit la finalité d'un objet technique comme étant extrinsèque, c'est-à-dire qu'il sert à autre chose qu'à lui-même. Son utilité réside dans sa capacité à accomplir une tâche extérieure de manière efficace. Prenons l'exemple du marteau: son unique fonction est de permettre d'enfoncer des clous de bois ou de métal. [...]
[...] Pourquoi une ?uvre d'art est-elle inutile ? Dès l'Antiquité, Platon posait la question de l'utilité de l'art dans La République. Pourtant, c'est au 19ème siècle avec le développement de l'art pour l'art que la notion d'"inutilité" de l'?uvre devient centrale. Dès lors se pose une question fondamentale : comment concilier cette inutilité affirmée avec la capacité révélatrice de l'art ? Mais qu'entend-on précisément par "?uvre d'art" ? On peut la définir comme toute création esthétique résultant d'un travail humain, qui poursuit une finalité intrinsèque, c'est-à-dire qu'elle ne vise que la réalisation de sa propre forme, sans application pratique extérieure. [...]
[...] L'exemple d'un Baudelaire qui révélait dans ses poèmes la beauté même du mal et du hasard de la vie. En étant moins préoccupé par l'acte que par la pure perception, l'artiste s'affranchit du filtre utilitaire et peut contempler le monde pour lui-même, sans projection d'intérêt pragmatique. Son regard révèle alors des dimensions du réel habituellement imperceptibles. Bien qu'apparemment paradoxal, l'objet inutile de l'art se révèle capable selon Bergson de révéler des vérités sur le réel que notre regard fonctionnel manque. Prenons l'exemple des paysages peints par Corot dans la forêt de Fontainebleau. [...]
[...] Elles révèlent une activité artistique développée dès -15000 ans chez l'homme moderne. Ces expressions esthétiques précoces chez l'homme préhistorique, bien que devant subvenir à des besoins vitaux, témoignent selon Bergson d'un penchant accidentel pour l'art révélant une faculté artistique innée. Après avoir examiné dans la partie précédente le paradoxe de l'?uvre d'art considérée comme objet technique inutile aux yeux de l'homo faber, il s'agit à présent de montrer comment, loin de nier sa valeur, cette inutilité constitue au contraire le fondement de sa capacité selon Bergson à révéler des aspects insoupçonnés du réel. [...]
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